— ELPHANIËL' Elle imagine des mains qui disent adieu Des larmes dans les yeux

« Comment t’appelles-tu ?
— Je ne te dirai pas mon nom.
— Pourquoi ça ?
— Je ne le dis pas à beaucoup de monde. Parce que personne ne m’appelle. Ou plutôt, on m’appelle, mais moi je ne réponds pas. Je ne réponds jamais. » Je ne réponds jamais.

Jamais.

× Donne-moi un sourire. Un sourire parce que tu es jolie.

Elphaniëlle, Elpha, Elphy, Eli, appelez-la comme vous voudrez. Elle ne vous répondra pas. Pas forcément. Elle ne répond pas souvent. Entre des murs de silence, elle s’enferme. Des lamentations permanentes qui ne font pas de bruit. Elle a peur de déranger, alors elle pleure cachée des autres. Elphaniëlle se cloître dans un univers … Un autre Ailleurs, un Ailleurs loin de la réalité. Loin du réel. Peur d’un trop noir dessein. Peur d’un trop noir monde. La vie dans le réel est effrayante. Tout y est… Si violent. Fourbe. Cassant. Elle se cogne à la vie comme on se cogne aux coins d’une table de nuit au réveil. Son corps est recouvert d’ecchymoses que le réel a causées, et qui ne s’en iront jamais. Parce que les blessures profondes ne cicatrisent pas avec un simple sort ou un antiseptique miraculeux. Les blessures intérieures… Ne cicatrisent jamais vraiment. Elle a la tête étrange. Un rien maniaco. Un rien dépressive. Des obsessions qui la hantent. Quelques raisons, qu'elle tait à tous. Quelque chose d'héréditaire, aussi. La magie ne résoudra rien. La magie ne résout pas tout. Elle ne sert pas à grand-chose quand il s’agit du cœur. Rien ne soigne les larmes. Rien ne soignera jamais… Ces choses qui font peur. Ces perles qui n’existent pas vraiment. Au fond, les pleurs sont immatériels, un peu. On ne retient pas les larmes dans le creux de ses mains.

× Elle a, dans ses yeux noirs, toute une histoire qui n’est pas son histoire. Elle porte en elle des chemins d’exils, les grands soleils d’anciens matins d’avril. Elle est comme orpheline d’une autre vie, elle sait qu’elle vient du Sud par amnésie. Y’a tant de rires, y’a tant de larmes vécues, comme dans un film qu’elle n’a pas vu.

Une demande en mariage. Un homme aime une femme, décroche pour elle la lune, la dépose à ses pieds, dépose en même temps un morceau de lui qui se détache pour s’incruster dans le ventre d’elle. La reproduction est étrange. C’est ce qui fait la vie. Ou le désespoir. Mais elle était née. Un bébé aux joues roses, au visage poupin au sourire joueur déjà. Des cris stridents, la mère qui la tient entre ses mains comme si elle maniait une poupée en porcelaine de chine.

× « Je suis sûre d’être née avec un morceau de cœur pas à sa place. »

Sinon, pourquoi serait-elle aussi étrange avec les autres ?

Elle n’est pas vraiment méchante. Elle n’est pas vraiment blessante. Elle est juste… Effrayée du monde, un peu. Mais elle sait faire la fête. Parfois. Elle a le plus charmant des sourires. C’est une adolescente. Elle en a le cœur fragile. Petite fille au milieu d’un monde trop brutal. Quelque chose persiste en elle. Une certaine douceur, une certaine gentillesse. Parfois une certaine excentricité. Il lui arrive de faire rire les autres, parce qu’elle aime ça, entendre les rires qui s’envolent jusqu’à elle. En tout cas, quand elle ne crise pas.

× « Pourquoi souffres-tu alors que tu as tout ce que tu désires… ? Pourquoi souffrir quand on peut être heureux ? — Parce que même quand tout va bien, il arrive qu’on essaie malgré tout d’aller mal. »

Une enfance banale. Stupéfiante de normalité. Des parents aimants, une grande soeur qui protège et qui aime. Un félin tigré qui lui fait des bisous. Une peluche en forme de tigre qui tient un gâteau dans ses pattes qu’elle câline à la place des garçons. Parce que les garçons,… Elphaniëlle… Elle, ne connait pas trop. Elle n’a jamais vraiment cherché à connaître. Pourtant il y’en a qui l’aiment. Il y’en a qui la veulent, qui la désirent. Son corps, son cœur, la noisette croquante de ses yeux. Terre brûlée. Cheveux bouclés qui retombent. Des jupes un peu trop courtes. Mais elle n’ose pas approcher. Elle n’aime pas vraiment les autres. Non, ce n’est pas exact. Elle les aime, mais elle les craint. Un peu. Surtout ceux qu'elle ne connait pas bien. Elle fuit l’amour parce qu’elle a beaucoup trop peur, trop peur d’en mourir. Les craintes dissimulent des problèmes plus sérieux. Peur des autres. Agoraphobie. Claustrophobie. Physio phobie. Les contacts, elle les fuit un peu parfois. Pas avec tous. Il y'a des gens qu'elle aime et qu'elle serre dans ses bras. Mais elle a peur souvent. Un cerveau qui se dérègle. Les crises lui sautent à la gorge. Comme une mort qui arrive trop tôt. Une mort sociale. Elle va parfois très bien. Elle soupire. Et va très bien. Elle sourit. Elle rit, comme les autres. Une lueur dans les yeux comme des reflets de soleil sur la surface d’un lac. Une femme en devenir. Une petite fille perdue. Une gamine qui se pose des questions d’adulte. Pourtant il y'avait bien eu ce garçon qui l'avait abordée une soir, près du saule cogneur de Poudlard. Il lui avait fait la conversation. Elle était restée presque muette le premier jour. Et puis elle s'était ouverte à lui.

× Elle est comme une enfant qui rêve de voir au delà des miroirs. Malgré ses peurs, elle voudrait refaire De tout son être , aux racines de son cœur. David a bien vaincu tous les géants L'espoir a bien ouvert les océans. Y a tant de larmes dans ses yeux plein d'espoir Y a tant d'envie de tout savoir.

Au début, ses pouvoirs lui faisaient peur. Mais pas autant que les gens. Et puis ses parents lui ont expliqué. Ils l’avaient tenue écartée du monde magique. Jusqu’à… Ce qu’elle soit une grande, comme ils l’appelaient. ‘Notre grande’. Elle avait à peine 8 ans. Grande et bébé. Contradiction de la chose. Mais ce n’était pas le plus important. Elle était sorcière. Elle comprenait que quelque chose l’avait rendue différente des autres. Les autres étaient… Juste… Humains. Connement humains. Mais elle, elle était humaine, mais sorcière. Au final ça ne changeait pas beaucoup. Si, en fait, mais elle ne savait rien encore. Un enfant recherche toujours la magie, dans les méandres de l’esprit, dans l’imagination, dans les décors qui l’entourent. Tout ça parce qu’il a besoin de rêver. Chercher la magie. Un peu plus loin, un peu plus haut.

× « Ou peut-être que je suis née avec un morceau de ce cœur en moins. »

Mère sorcière. Père moldu. Première année à Poudlard. Un début difficile. Elphaniëlle est difficile, elle aussi. Une enfant terrible. Elle a des amis, parce qu’elle est belle et qu’elle réfléchit beaucoup. Elle ne parle pas trop, mais elle parle quand même. Souvent ses regards se perdent dans l’horizon lointain. Souvent elle se perd, s’en va, … Ailleurs. Dans un autre monde, au milieu d’une conversation. Souvent les autres la trouvent… Etrange. Perturbée. Tout se passe dans la tête, ce qu’on dit quand on ne sait pas d’où naît un problème. Elphaniëlle ne parle pas beaucoup, mais elle écrit ce qu’elle veut dire sur des pages blanches qu’elle déchire et tend aux autres quand elle ne trouve plus la force de parler. C’est juste… Quand elle se sent vraiment mal et qu’elle ne veut pas ouvrir la bouche. C’est pour ça qu’elle garde toujours contre sa poitrine un stylo plume et un bloc note tout petit. Juste au cas où les mots ne voudraient pas sortir oralement. Juste au cas où. C’est une sorte de filet de sécurité. Une bouée qu'on dessine. Un espoir par écrit. Une communication comme une autre. Juste un peu... Différente de la vôtre. En réalité, elle a très peur des mots. Elle sait qu’ils sont dangereux. Vicieux. Trompeurs. On peut faire du mal juste en disant un mot. On peut tuer quelqu’un juste en disant Je t'aime. Et peut être se dit-elle qu'un mot écrit à l'encre blesse beaucoup moins que celui qu'on dit et qu'on ne reprend pas. L'écrit a des avantages. On peut raturer. Si on a tracé les lignes d'un Je t'aime trop tôt. Elle peuvent s'effacer. Même si...

× « Elphaniëlle, tu es née avec un cœur normal. Puisque tu sais aimer. Tu sais aimer très fort. C’est peut-être même ce qui te perdra un jour prochain. Mais tu ne sais pas aimer comme il faut. Tu ne sais pas aimer normalement. Si tu tombais amoureuse, et tu tomberas amoureuse ; tu perdrais le contrôle de tout et c’est sans doute pour ça que tu as l’impression d’avoir un cœur handicapé. Mais rassure-toi. Tout le monde est pareil. »

Aujourd’hui c’est la sixième année. Sixième année d’étude. Sixième année de sorcière. Toujours autant de craintes. Toujours autant de faux semblants. De sourires suivis de grimaces. Des dépressions passagères. Des excitations, des joies qui ne durent pas forcément. Les élèves l’aiment bien. En général. Mais on a peut être juste pitié d’elle, comme on a pitié du roseau qui va rompre, du soleil qui meurt derrière les dunes de sable, ou du pétale de rose qui choit. Le parfum des années mortes. Quelque chose qui frappe à la porte. Une foule de sentiments qui bouscule le reste. De la pitié. Juste de la pitié sans doute. C’est le pire sentiment. Elle, a peur d’eux. Des gens. Des sentiments. D’un en particulier. D’un parce que…

× « T'es une grande maintenant, Elphaniëlle. T'es une grande. Tu dois apprendre à souffrir. Tu dois apprendre à aimer. A aimer... Juste une personne, une plus que les autres. Tu crois que tu sauras ? »