Lily Evans - Une rousse au caractère de feu

« Monstre ! Tu n'es qu'un monstre. Je vais le dire à maman. Je vais le dire à tout le monde. Tu deviendras Lily le monstre ! » Ces mots ne cessent de marteler mon esprit. Des mots blessants d'une petite fille à une autre ; d'un être qu'on croyait nous aimer à un être qui n'a pas cessé d'espérer ; d'une sœur à une autre. En tout cas la nuit est terminée pour moi, je ne pourrais pas à nouveau fermer les yeux. Je pense continuellement aux derniers événements, avec le sentiment malheureux que je n'ai ma place nulle part. Pas assez normale, pas assez anormale. Un entre-deux déplaisant qui me place à un rang spécifique que je n'apprécie pas. Pour ne pas réveiller mes camarades de dortoir en me tournant et me retournant dans les draps, j'attrape le livre qui fait l'objet de ma dernière lecture et qui gît sur le bord de ma table de chevet. Je me glisse par l’entrebâillement de la porte et descend à pas de velours les marches qui mènent jusqu'à la salle commune. Je doute fortement être la seule à ne pas dormir, notamment pour quatre garçons de Gryffondor qui sont spécialistes dans le fait de ne pas suivre les règles, si mon insomnie peut me perdre de les attraper à leur retour ça ne pourra être qu'un bonus. Le feu grésille alors qu'il parsème la pièce de ses dernières lueurs dansantes. Mon attention s'y concentre et je viens à réfléchir. A me rappeler.

31 Janvier 1960. Le jour où je suis née, il n'y a rien d'autre à dire là dessus. Je suis arrivée dans une famille aimante, la seconde fille Evans qui allait grandir dans une petite cité ouvrière de l'Angleterre dont le nom n'a pas grande importance. Une vie simple pour des personnes simples et unies. Nous n'avions rien à cacher, pas de cadavres dans les placards, pas d'argent dissimulé sous le lit. Je ne crois pas avoir grand chose à dire. J'ai été heureuse, sans doute je ne pourrais plus jamais l'être autant. Quand on est jeune, on est baigné par l'insouciance, le monde n'est qu'un grand univers où tout est permis, où tout se résume au jeu et à la joie. Nous ne sommes pas encore atteint par les sentiments adultes qui savent si bien compliquer la vie. Ma sœur Pétunia était alors ma meilleure amie, il était difficile voir même impossible que nous ne soyons pas l'une avec l'autre. Une complicité telle qu'elle existait entre nous était un cadeau des dieux, et sans aucun doute un réel soulagement pour nos parents, nos quelques années d'écarts ne bouleversaient pas l'équilibre que nous avions réussi à construire.

J'avais prié pour que cela ne s'arrête jamais. Pour que le temps marque une pause et que nous restions dans notre imaginaire d'enfants à s'amuser nuit et jour de ce que la vie nous offrait. Il y a des événements qu'on ne peut pas prévoir, tout comme les réactions et les conséquences qui en découlent. Quelques petits changements s'opéraient en moi, je ne pouvais l'expliquer et je ne savais pas quand cela pouvait se produire. J'étais magicienne, en tout cas c'est par ces mots d'enfants que j'aimais à me définir. Imaginer un instant que la magie existait et qu'un monde « parallèle » cohabitait avec le mien était impensable. Je faisais de petits tours au gré de mes envies et Pétunia m'observait. Elle était ma meilleure spectatrice. Je ne voyais pas alors que ce don allait poser problème et que ma sœur ressentait déjà les prémices de la jalousie naître dans son cœur. Elle ne pouvait imiter ce que je faisais et malgré la tristesse que j'aurai pu percevoir en l'observant avec attention, mais je m'amusais tellement que je ne pouvais pas m'arrêter. Et puis une rencontre finie de tout changer entre nous. Severus Rogue. On s'était croisé un peu par hasard dans le parc qui jouxtait nos deux quartiers. Si j'avais été enchanté de le rencontrer, Pétunia n'avait pas du tout apprécié elle. Il m'a permis d'ouvrir les yeux sur la fille que j'étais. Et je l'ai perdu elle. Il est devenu rapidement le meilleur ami que je n'avais jamais eu jusqu'ici. On ne parlait pas des choses qui nous contrariait vraiment, on comprenait facilement l'autre sans ça. On savait être là l'un pour l'autre et apporter le réconfort qu'il fallait. Rires et sourires au rendez-vous à chaque fois que l'on se retrouvait. L'année de mes onze, une lettre vient définitivement confirmer que j'appartenais à un autre monde que celui dans lequel j'avais grandis. J'étais une sorcière, j'étais différente des autres. Et si pour mes parents s'étaient un émerveillement, il semblait que Pétunia ne ressente que du dégoût à mon égard. « Monstre ! Tu n'es qu'un monstre. Je vais le dire à maman. Je vais le dire à tout le monde. Tu deviendras Lily le monstre ! »

Mon entrée à Poudlard a été un véritable choc pour ma part. Je dois dire que je ne savais pas à quoi m’attendre en allant là-bas et même si j’avais essayé de me représenter l’événement, je dois dire que j’ai été littéralement soufflée dès mon arrivée. Mais j’ose croire que tous les jeunes sorciers qui arrivent pour la première fois dans cette école de magie ne peuvent être que surpris parce qu’ils voient. Severus était là pour me soutenir, et j’étais certaine qu’ensemble on serait bien plus fort pour pouvoir commencer notre scolarité particulière. Pourtant, le destin avait décidé autrement, j’intégrais Gryffondor et de son côté Serpentard. Je ne pensais pas que cela pouvait nous éloigner l’un de l’autre. Il m’avait conté l’histoire des maisons, celles qui pouvaient s’entendre et celle qui restait principalement à l’écart des autres. J’avais essayé de maintenir notre relation au beau fixe mais il fallait bien constater que le temps ne jouait pas en notre faveur, on s’appréciait, on s’entraidait pour les devoirs mais il était impossible de se voir autant qu’avant. Et malheureusement un autre phénomène les empêchait d’être proches. Ce n’était pas une chose mais un groupe de personnes, des garçons au nombre de quatre de la même maison que moi. Les leaders portaient les noms respectifs de James Potter et de Sirius Black. Deux insupportables êtres humains qui s’amusaient à pourrir la vie des autres gens. Nous étions tous entrés en même temps à Poudlard et en cinq années de cours, nos relations ne s’étaient pas améliorées. Ils prenaient Severus pour bouc-émissaire, dès qu’il y avait une blague à tester ils ne semblaient pas pouvoir s’empêcher de le faire sur lui ou sur les Serpentard. Et cela s’était aggravé depuis que monsieur Potter, à la tête identique à une montgolfière, me donnait l’impression d’avoir une certaine attirance pour ma part. Il ne savait pas aligner deux mots corrects face à moi où s’était pour me sortir des phrases toutes prêtes entièrement dénuées d’intérêt et tellement banales qu’elle ne me causait que de l’énervement. En tout cas celui-ci détestait que je traine avec lui. Comme si je lui appartenais, que j’étais sa chose. Je suis une jeune fille, une jeune femme indépendante qui n’a pas besoin d’un garde du corps personnel et je refuse au plus haut point de n’être qu’une autre gourgandine qui se pavane devant lui et qui pleure à la seconde où il a eu ce qu’il voulait. Je ne suis pas un prix sur un tableau de chasse. En tout cas, Severus lui semblait avoir retrouvé réconfort auprès d’une de ses camarades. Jalouse, je l’avouais sans conteste, de ne pouvoir posséder la même complicité. Et même si certains affirment qu’il y a quelque chose entre nous, pour moi il n’en ait rien. C’est simplement mon plus vieil ami et entre la disparition du professeur Slughorn, les attaques contre les élèves sans parler de la menace des mangemorts contre les nés-moldus comme moi, j’avoue que la peur s’immisce parfois et que le soutien entre les uns et les autres est le meilleur moyen de se liguer contre ce qui est en train d’arriver.  

Je crois avoir trop longtemps fixé le feu. Il ne crépite plus, et ce sont les premières lueurs du jour qui éclairent la salle commune. J’ai dû m’endormir à rêvasser là. Mon livre n’est plus sur mes genoux mais bien posé sur une petite table basse. Quant à moi, une couverture moelleuse a été déposée sur mon corps pour que je n’attrape pas froid. J’aurais juré avoir sentis quelqu’un embrasser mon front pendant mon sommeil. Mais ce n’est qu’une impression …